Le legacy, la « poison pill »? de la transformation digitale

Le legacy, un système qui ne se transforme jamais

Tous les DSI ou CIO le disent, un des freins majeurs de la transformation digitale est l’inertie du legacy ou système patrimonial. Ce système, ancien par définition, ne finit pas d’accumuler les évolutions fonctionnelles et techniques, et, de ce fait, est devenu si gros, que la simple évocation de sa refonte réveille un véritable cauchemar, la peur que l’ouverture de la boite de Pandore libère un cataclysme et mette à bas le niveau service et l’engagement que la DSI a patiemment construit. Dans ce contexte, l’exigence première est la continuité du service, malgré le changement.

La théorie de la fiabilité nous enseigne que la probabilité de panne d’un système suit une loi de Weibull, elle est plus importante lors de la mise en service d’un système, puis baisse régulièrement jusqu’à un minimum, et augmente de nouveau. Lorsque le coût de maintenance dépasse un seuil donné, il devient plus intéressant de remplacer un système coûteux et enclin à tomber fréquemment en panne que de le conserver.

Or, dans certains secteurs d’activité, l’opportunité de remplacement ne se présente jamais. Elle est entravée par la complexité et la taille du système qui font craindre des coûts de refonte prohibitifs qui dépasseront toujours le coût de possession constaté et l’exigence absolue de continuité du service. C’est la trappe du legacy.

En effet, le legacy est souvent une stratification de technologies et d’architectures qui se sont accumulées au court du temps. On trouve pêle-mêle des souches d’applications centralisées, des ERP départementaux, des applications 3 tiers, des applications internet interconnectés par des systèmes d’échanges qui assurent des médiations complexes. La survenue d’un événement touchant un composant peut se propager, par le jeu des dépendances fortes, à tout le système.

Pour s’en sortir, certaines entreprises ont envisagé de construire, à côté du « legacy », un nouveau système, dans le but de migrer progressivement leurs opérations et de se détacher de l’ancien. La grande majorité de ces projets ont connu de faibles taux de migration et ont eu pour résultat, en rajoutant un nouveau composant, de complexifier le SI.

Pourquoi en arrive-t-on la ?

La Marche à monter est élevée. La transformation digitale requiert une révision radicale de leur architecture du legacy, il faut transformer son fonctionnement. C’est l’exemple de la Banque Digitale vis à vis de la Banque traditionnelle en ligne. Certains acteurs, pourtant leaders sur leur Marché, connaissent des déboires majeurs, médiatisés, et démontrent leur difficulté, voir leur impossibilité à abandonner une gestion de compte en Cobol, faiblement réactive, à J+1, et obsolète selon les critères du digital qui exigent une réaction immédiate.

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Pour faire face à cela, les entreprises ont nommé des Chief Digital Officer qui leur ont permis de faire une partie du chemin en prenant le virage du digital, c’est à dire en rénovant leurs processus de vente et leurs systèmes d’information front-office. Comme elles ont adopté un « business model » de type opérateur de services, basés sur abonnement, elles doivent maintenant faire évoluer leur legacy.

A la marche élevée, il faut ajouter à cela la grande capacité d’oubli des organisations qui, en quelques années, ont désappris les composants les plus anciens de leur système d’information, et en ont perdu la maîtrise. Si ces 20 dernières années, elles ont pour la plupart, réussi à maintenir leurs systèmes patrimoniaux, elles sont incapables de les transformer.

Il faut enfin ajouter la faiblesse des incitations financières car la maintenance en conditions opérationnelles (MCO) du legacy ne représente qu’une petite partie des coûts de maintenance. Les évolutions liées à la maintenance réglementaire et à la mise en oeuvre de nouvelles offres occasionnent un investissement continu qui absorbe tous les ans les ressources qui auraient du être employées à la rénovation du système.

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Cela revient à investir, tous les ans, pour ajouter des roues à une 4L Renault, sans jamais consacrer d’énergie à changer la voiture elle-même. On se retrouve, après quelques années, avec une voiture ingouvernable, qu’on a du mal à remplacer car aucune solution équivalente n’existe sur le Marché.

Il faut pourtant en sortir

Chaque évolution accroît mécaniquement la dette technique du legacy. Si elles ne sortent de la trappe du legacy, les entreprises ne pourront pas percevoir la totalité des gains de la transformation digitale.

Les clés du succès résident dans :

  • Le développement de l’architecture logicielle. Ces dernières années, les entreprises ont développé des directions de l’architecture qui ont investit dans l’architecture d’entreprise te plus récemment dans l’architecture data. Elles ont délaissé les compétences d’ingénierie logicielle au profit des éditeurs, notamment la maîtrise des architectures « Cloud Ready ». Ces compétences sont rares et, aujourd’hui, hors de prix. Il faut mettre en place une stratégie qui associé recours à des compétences externes et montée en compétence des internes.
  • La maîtrise technique et économique du développement, de l’intégration et de la mise en production en continu. C’est un corollaire pour exploiter les avantages des architectures logicielles, du Cloud computing et soutenir la généralisation des démarches agiles.
  • Un management des ressources techniques et humaines IT qui incite et accompagne les évolutions des compétences. Dans ce contexte, l’approche bi-modale est à proscrire. Il faut installer un environnement de collaboration avec du coaching croisé et des KPI d’équipe.

Le difficile rôle de chef d’orchestre revient au DSI qui, fort d’un diagnostic réaliste de la maturité de sa DSI, a défini une roadmap qui aménage le bon timing de changement pour les processus techniques, le management IT, l’acquisition des compétences et l’adaptation aux enjeux de la transformation digitale : nouvelles technologies, nouveaux modes de travail, nouvelles manières de manager.

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